En 1998, ma route a croisé celle d’une jeune fille de 12 ans, Tiffany, et de sa maman Maguy.
Elles se battaient, ensemble, avec un courage, une soif de vivre et une gentillesse qui d’emblée, ont illuminé tout le service.
Au fil des moments partagés, la confiance s’est installée, faisant vite place à une amitié sincère et profonde.
Nous bricolions, parlions de tout, de ses espoirs, de ses projets, de ses copines et bien sûr du combat qu’elle menait avec une force et une confiance qui ont gagné mon respect et mon admiration.
J’ai eu le privilège de partager avec Tiffany des moments merveilleux comme la rencontre avec celui qui allait devenir notre ami, Jean-Jacques Goldman, notre voyage à Marseille, avec cinq autres patients de Médecine A1, pour assister au concert des Enfoirés ou le concert de Jean-Jacques Goldman à l’Aréna pour lequel elle a mobilisé toutes les dernières forces de son corps épuisé par la maladie.
Je n’oublierais jamais nos déambulations dans le parking de l’Aréna avec sa chaise roulante car sa maman ne retrouvait pas sa voiture. Nous avons tellement ri .
Lors d’un de nos après-midi bricolage, nous faisions des projets pour l’après……et elle m’a confié son envie de participer à la Course de l’Escalade et sa frustration de ne pouvoir réaliser ce rêve car plusieurs opérations chirurgicales de la jambe l’empêchaient de courir.
Alors, j’ai prononcé cette simple phrase qui eu tant de conséquences :
« Chiche que tu la feras cette course, avec la Marmite, on te construira un véhicule, on te poussera mais en décembre, tu seras au départ. »
Malheureusement, quelques mois plus tard, la bataille dans laquelle elle avait mis tant de volonté et d’espoir s’avéra perdue. Elle nous quitta, laissant dans le cœur de ceux qui ont eu le privilège de faire partie de sa vie un vide immense que même le souvenir lumineux de sa personnalité n’a jamais pu combler.
Aussi, pour lui rendre hommage, autant que pour tenir ma promesse, j’ai chaussé mes baskets un matin d’automne, bien décidée à courir pour Tiffany.
Je vous épargnerais les premières sorties, le souffle que l’on a pas, les jambes qui font mal et l’impression que le défi est peut-être hors de portée.
Puis, les conseils de coureurs avisés, la découverte du fractionné, trois mois d’efforts, pour enfin, le jour J, terminer cette course remplie d’émotions contradictoires, la joie d’avoir réussi mon pari et la tristesse car Tiffany n’était plus là, quoique….
Après cette première course et la création dans ma commune, d’une équipe de coureurs, j’ai décidé de poursuivre mes entraînements, consciente que le sport m’apportait un excellent moyen pour décompresser de mon quotidien et des émotions que je pouvais emmagasiner auprès des enfants malades.
Puis, petit à petit, à mesure que les distances de course augmentaient, l’envie de disputer LA course, les 42.195km du Marathon, et, s’il ne devait y en avoir qu’un, ce serait New- York en 2006.
Oui, mais pas pour moi seule, besoin de partager ce rêve avec ceux qui en sont le moteur.
C’est pourquoi, le 5 novembre dernier, en compagnie de mes partenaires d’Avusy Court, je me suis retrouvée au départ du marathon de New-York.
Après douze mois d’une préparation intensive, j’allais pouvoir disputer cette course mythique au milieu d’un peloton de 39’000 coureurs.
La course fut belle, les conditions idéales et je l’ai terminée en 3 heures 59’22 », temps inespéré, récompense de tant d’efforts.
Je suis allée au bout de moi-même, les derniers cinq kilomètres ont été parcourus au prix d’une souffrance intense et sans le soutien de mon coach Olivier, j’aurais baissé les bras et terminé au ralenti.
Durant cette dernière demi-heure de course, je suis persuadée que tout mon vécu auprès des enfants malades m’a porté et m’a aidé à me surpasser.
Je me devais de rendre hommage à leur immense courage.
Si Tiffany est à l’origine de ma découverte de la course à pied, d’autres rencontres riches et émouvantes, drôles et remplies de confiance, pleine d’amour et de complicité m’ont enrichies toutes ces années et m’ont donné, semaines après semaines, l’envie de partager ces petites bulles de plaisir.
En rédigeant ces quelques pages, je pense à ces familles dont j’ai croisé le chemin à un moment difficile de leur histoire et qui, toutes, m’ont fait cadeau de leur confiance.
J’ai une pensée émue en me remémorant tous les visages de ces enfants, leurs sourires, leurs coups de gueule, leur enthousiasme, leur force, leur incroyable espoir et surtout leur immense courage.